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Des clés pour réenchanter le rôle du manageur

Debriefing de la deuxième table ronde organisée par la CFE-CGC lors de la présentation, le 24 avril, de son étude SUPERMANagement conduite avec l’ANACT.


Après une première table ronde consacrée essentiellement au télétravail, le colloque SUPERManagement de la CFE-CGC a instauré un deuxième débat sur le thème « La relation managériale à réenchanter. » Objectif : comprendre comment les problématiques managériales issues du télétravail et de toutes les évolutions en cours peuvent se dénouer sur le terrain par l’inventivité et le dialogue social.


Le management, un vecteur pour changer la société


« Il est difficile pour les manageurs de se situer parmi toutes les recommandations qui proviennent des cabinets de conseil : suppression des lignes managériales, fonctionnement en mode projet, montée de tel ou tel mode de reporting… Tout cela change avec les années, mais finalement on s’aperçoit qu’il n’existe pas qu’une seule bonne méthode de management, mais que le manager est un chef d’orchestre qui doit composer avec les individualités de son équipe. Il y a autant d’équipes que de façon de manager et nous allons poursuivre nos réflexions pour réenchanter cette fonction. Car être manager, c’est formidable : cela donne la possibilité de changer la société autour de soi, de faire grandir ses collaborateurs, de transformer les gens, d’être le manageur qu’on aurait voulu avoir… »Maxime Legrand, secrétaire national de la CFE-CGC en charge de l’organisation du travail et de la santé au travail


Montée de nouvelles attentes de la part des cadres


« Les directions attendent en premier lieu que les managers assurent une production de qualité et qu’ils atteignent leurs objectifs ; les collaborateurs que leur manageur leur accorde de la reconnaissance et valorise leur travail. Néanmoins, de nouvelles attentes apparaissent : le développement des compétences, le fait de donner du sens au travail, l’instauration d’une bonne ambiance. Et les pratiques évoluent : depuis trois ans, les manageurs délèguent plus, font davantage confiance à leurs collaborateurs et adaptent davantage leur management à chaque personne. Par ailleurs, ils ne souhaitent catégoriquement pas de retour en arrière sur le télétravail : un sur deux ne rejoindrait pas une entreprise qui n’en propose pas, la même proportion quitterait l’entreprise si elle venait à le supprimer. »Pierre Lamblin, directeur des Etudes de l’Association pour l’emploi des cadres (Apec)


Redéfinition de la notion de travail


« L’évaluation du travail a pris une nouvelle complexité avec le travail à distance. Pour le managé (qu’il soit salarié sans responsabilité d’équipe ou manageur ayant lui-même un supérieur hiérarchique), la question de l’invisibilisation de son travail pose des questions : sur quels critères vais-je être évalué ? Sur quels critères vais-je évoluer ? Comment toute l’ardeur que j’aurai mise à effectuer mon travail, à résoudre les difficultés, comment toutes les astuces de métier que j’aurai employées, toute la personnalité que je mets dans mon travail, vont-elles être reconnues ? Au-delà de l’évaluation de la mission, qu’en sera-t-il de ma carrière sur le long terme ? Est-ce que je ne vais pas être défavorisé par rapport à d’autres en présentiel ? En tant qu’ergonome, je pars de l’idée que ces questions de management à distance présentent une opportunité formidable pour redéfinir ce qu’on attend du travail et pour s’interroger sur ses attendus. »Sophie Prunier-Poulmaire, ergonome et Maître de Conférences à l’Université Paris-Nanterre


Formation sur-mesure pour les manageurs


« Dans le Groupe Le Monde, nous avons construit un parcours de formation spécifique d’environ 18 mois pour les manageurs. Il comprend des modules classiques mais aussi des modules plus innovants : sur le rôle du manageur dans la prévention des risques professionnels ; sur la prévention des violences sexistes et sexuelles, et du harcèlement moral ; sur le droit social, la durée du travail, le rôle des représentants du personnel, etc. Ce cursus s’accompagne de trois rendez-vous fixés à chaque prise de poste pour voir le niveau de maturité de la personne sur les enjeux managériaux, pour construire son parcours de formation, mais aussi pour estimer quelle proximité il faudra avoir avec elle, les premiers mois, pour éventuellement l’accompagner dans les moments difficiles. Nous lui assurons ainsi une sorte de SAV du management. »Emilie Conte, DRH du Groupe Le Monde


Importance du présentiel en début de carrière


« Il y a une ambivalence, en particulier chez les jeunes générations, dans le rapport au télétravail. Il n’est plus question d’intégrer une entreprise qui n’en propose pas, mais en même temps, l’absence de présentiel durant les premiers mois d’insertion pose un problème fondamental. Ce sont des moments où le nouvel embauché peut dépasser la formation technique et stratégique qu’il a reçue pour découvrir les savoir-faire, les habiletés, tout ce qu’on acquiert en étant au contact des autres et qui ne s’apprend nulle part ailleurs. On voit de manière étonnante des jeunes cadres qui renoncent au travail qu’ils ont choisi, parfois même avec vocation, parce qu’ils se sentent, je cite, « seuls », connaissant la technique de base mais ignorant les rouages du métier. Trop de travail à distance tue peut-être la passation de l’expérience et explique qu’on ait du mal à fidéliser ces jeunes générations. »Sophie Prunier-Poulmaire


Respect de la promesse employeur


« On n’observe pas de crise de vocation : 84 % des cadres manageurs en poste souhaitent le rester ; 42 % des cadres non-manageurs souhaitent le devenir, dont 63 % des moins de 35 ans. La fonction attire toujours mais s’accompagne de nouvelles conditions : pouvoir dégager davantage de temps pour gérer le collectif, disposer des outils adéquats (pour intégrer l’intelligence artificielle générative notamment). Cela oblige les entreprises à être très vigilantes sur leur promesse employeur. S’il y a un décalage dans le temps entre cette promesse et la réalité, si à l’embauche on fait miroiter une évolution professionnelle, des développements de compétences, une hausse de rémunération, et que, six mois ou deux ans plus tard, cela n’est pas réalisé, le cadre démissionne. Ces dix dernières années, 22 % des cadres ont démissionné dans les deux ans suivant leur embauche, 42 % chez les moins de 35 ans. Souvent, ils ont trouvé une autre entreprise avant de partir, donc c’est peine perdue d’essayer de les retenir. Le rapport de forces est en leur faveur. »Pierre Lamblin (Apec)


Créativité dans le dialogue social


« Dès que la CFE-CGC peut négocier un accord, à tout niveau, entreprise, branche, Europe, elle le fait. Ensuite, au-delà des sujets sur lesquels nous sommes autorisés à négocier, il faut faire preuve de créativité. Prenons l’exemple d’une entreprise informatique qui s’apprête à sortir un logiciel. Pour des raisons de confidentialité, elle demande à tous ses salariés de revenir au bureau pendant les deux mois de la dernière ligne droite. Nous pouvons entendre cet argument en tant que partenaire social. Inversement, c’est à nous de convaincre les patrons de lâcher leurs prérogatives et d’ouvrir le dialogue sur des sujets comme la RSE ou l’intelligence artificielle. L’IA va accélérer la prise de décision, mais s’il n’y a pas un manager capable de prendre ses responsabilités face à l’IA, il y aura des problèmes humains et économiques. A nous d’occuper le dialogue social et de pousser les employeurs à aborder ces nouveaux enjeux cruciaux. »Maxime Legrand

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