Soumettre l’accès aux activités sociales du CSE à une condition d’ancienneté est illicite
Dans un arrêt du 3 avril 2024 (Cass.soc.,3 avril 2024, n° 22-16.812), la Cour de cassation a estimé qu’un CSE ne pouvait pas retenir l’ancienneté dans l’entreprise comme critère d’octroi d’une activité sociale et culturelle (ASC).
Jusqu’à présent, les CSE pouvaient se référer à une tolérance de l’URSSAF qui admettait que le bénéfice des ASC pouvait être réservé aux salariés ayant une ancienneté, dans la limite de 6 mois.
Désormais, les activités sociales du CSE ne peuvent plus être réservées aux salariés disposant d’une ancienneté minimale dans l’entreprise. Elles doivent être ouvertes à tous les salariés et aux stagiaires quelle que soit leur ancienneté.
Ainsi pour les activités accessibles en permanence, tout au long de l’année, le CSE devra leur donner plein accès dès le premier jour de travail.
Pour les activités ponctuelles liées à un événement (Noël, fêtes des mères et des pères, sorties, etc.) le CSE devra s’assurer que les salariés en CDD seront toujours à l’effectif pendant la période de distribution ou d’accès à ces avantages, ce qui suppose de connaitre la durée de leur contrat. L’exercice sera plus compliqué pour les CDD sans terme précis.
Pour motiver sa décision, la Cour de cassation ne se fonde pas sur les principes de non-discrimination et d’égalité traitement mais sur les articles L. 2312-78 et R. 2312-35 du Code du travail qui ouvrent l’accès aux prestations du CSE à tous les salariés et aux stagiaires sans poser aucune condition.
Cette décision oblige dès à présent les CSE qui utilisaient une condition d’ancienneté à changer sans attendre leur pratique et à modifier leur règlement intérieur pour supprimer cette condition, sauf à s’exposer à des litiges tant de la part des salariés lésés en vue d’obtenir les prestations non versées et, le cas échéant, des dommages et intérêts, que par une organisation syndicale ou par tout membre du comité pour faire annuler la clause litigieuse relative à l’ancienneté.
A ce titre, la question devra être inscrite à l'ordre du jour d'une réunion plénière, et faire l'objet d'une délibération afin de redéfinir les conditions d’accès aux prestations du CSE et donner l’information à tous les salariés.
Il faudra également, peut-être, revoir en profondeur les activités sociales compte tenu de cette jurisprudence, car le budget du CSE pourrait être insuffisant pour continuer à servir les mêmes avantages dès lors qu'un nombre plus important de salariés en seront bénéficiaires.
Rappelons cependant que la rémunération des salariés en CDI comme en CDD est prise en compte dans la masse salariale servant au calcul du budget des ASC dès leur premier jour de travail.
Cette décision impose de suivre désormais l’état des effectifs en temps réel. Cela suppose que les élus disposent des informations relatives à l’effectif chaque mois (entrée/sorties, nombre de CDI, CDD).
Aussi, nous vous conseillons de vous organiser avec votre employeur pour la transmission de ces informations qui relèvent par ailleurs d’une obligation légale.
Certains s’interrogent sur la possibilité de moduler les prestations en fonction d’un critère d’ancienneté des salariés ou stagiaires, sous la forme par exemple d’une prise en charge financière croissant avec l’ancienneté.
Pour la Cour de cassation, c’est l’ouverture du droit à bénéficier des activités sociales qui ne peut être subordonnée à une condition d’ancienneté. La Cour ne se prononce pas directement sur la question de la modulation des œuvres sociales au regard de l’ancienneté.
Cependant l’Urssaf n’admet pas la modulation selon l’ancienneté des salariés, laquelle peut constituer un motif de redressement. Elle considère que la modulation doit reposer sur des critères sociaux et objectifs (quotient familial, revenu fiscal de référence, rémunération du salarié, etc.).
Il convient donc d’être prudent dans le choix des critères de modulation des activités sociales, lesquels doivent répondre à des critères objectifs et mesurables, respectueux du principe de non-discrimination posé par le Code du travail (Cass. soc., 30 janv. 2008, no 06-46.447).
Quel que soient vos choix, ils devront être validés en réunion de CSE à la majorité des membres.
Comments